Douze fois chéri, roman
EAN13
9782848930183
ISBN
978-2-84893-018-3
Éditeur
Deux terres
Date de publication
Collection
2TER.ROMAN FEM.
Dimensions
24 x 15,3 x 3,8 cm
Poids
714 g
Langue
français
Langue d'origine
anglais
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Douze fois chéri

roman

De

Traduit par

Deux terres

2Ter.Roman Fem.

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Titre original :
Twelve Times Blessed
Éditeur original :
HarperCollins Publishers, New York
© original : Jacquelyn Mitchard, 2003
ISBN original : 978-0-06621-475-7
Pour la traduction française :
© Éditions des Deux Terres, mai 2005
Couverture : © Getty Images
ISBN: 978-2-84893-107-4
Tous droits réservés.
Cette édition est publiée avec l'accord de
HarperCollins Publishers.

ISBN : 978-2-84893-107-4

À Pam, mon roc,
Franny, ma lumière,
et à l'équipe.
Je les chéris tous.

Février

Drôle de saint-valentin

Nous vous mettons au défi de trouver de quoi mieux combler l'âme que ces chocolats enfermés dans cette boîte à secrets capitonnée de satin rouge (pour cacher les dents de lait au passage de la petite souris ?). C'est pour vous seule. Le bébé, lui, sera emmitouflé dans un pull-over de saison à capuche rayé blanc et rouge. Lui comme vous porterez votre paire de chaussettes bordées de flèches dorées avec un cœur en or pour les garçons, et pour les filles des cœurs et des perles roses et rouges (impossibles à arracher même par les petits doigts des plus curieux). Le romantisme manque à votre vie depuis l'arrivée de qui vous savez ? Pas après que vous vous serez détendue en écoutant ce CD. Le Boléro n'est que le début.

Un lieu familier, quand vous avez pris la mesure de la vie, peut vous sembler aussi exigu que votre pantalon habituel, quand vous avez pris du poids. Pour Verity Dickinson c'est vrai dans les deux cas, et sa gêne est autant due au pincement au cœur que lui infligent ses regrets qu'à l'obligation de rentrer le ventre pour fermer sa ceinture.

À vol d'oiseau, comme on dit, Verity Dickinson ne vit qu'à un kilomètre et demi du détroit de Nantucket. Mais récemment, et à regret, elle a été incapable de contempler ses flots couleur d'étain avec la même admiration respectueuse que les autres hivers, tout comme elle a cessé d'éprouver de la gratitude envers ses amis, de la fierté en pensant à sa réussite sociale et une satisfaction mêlée de surprise à la vue de sa petite famille. Depuis qu'elle a quitté Amherst, son lieu de naissance, pour Cape Cod – d'abord comme jeune fille au pair pendant ses vacances d'été à l'université, puis comme jeune épouse avec son mari, pilote de taxi de la compagnie Cape Air sur de courtes distances –, jamais elle n'a éprouvé une telle effervescence. Lors d'étranges divagations, elle se voit déménager, fuir ses journées bien organisées – comme une mèche s'échappant parfois de la natte bien tressée et raisonnable qu'elle pourrait faire dans le noir tant elle en a l'habitude. Elle se surprend à penser : Je vais quitter la ville, aller dans l'Ouest sauvage. Je n'emmènerai que mon fils. Adieu, Cape Cod. Je trouverai un lieu où il y aura plus d'oxygène, plus de ciel.

Son accablement est, bien sûr, exagéré. Il est dû aux circonstances, pas à la situation.

Car, tout comme les oiseaux ne volent pas droit – ils sont tellement curieux, toujours à virer sur l'aile pour explorer quelque chose de brillant ou d'odorant, qu'il leur faut probablement plus longtemps pour se rendre où que ce soit qu'à un humain dans une voiture respectant les limitations de vitesse –, Verity se sent piégée non par le manque d'espace à l'extérieur, mais par la profusion de vide à l'intérieur d'elle-même. Elle est seule. Les brins qu'elle a tricotés toute sa vie se dénouent. Son fils, qu'elle a l'habitude de considérer comme un petit garçon, va avoir dix ans, l'âge mûr de l'enfance. En conséquence, Verity ne peut plus prétendre qu'elle est une « jeune veuve ». Sa mère vieillit. Ses employés de longue date parlent d'autres lieux où aller vivre, de nouvelles aventures à entreprendre.

Elle commence à se voir sur la ligne d'un nouveau départ. Se décrirait-elle de cette manière ? Sous hypnose, peut-être.

Verity sait qu'elle souffre d'une dépression saisonnière. Et c'est la saison. Dans une station touristique où chaque point de vue est un paysage d'aquarelle, février n'est pas un mois plus solitaire que les autres, plutôt moins qu'ailleurs. Mais si, peut-être plus qu'ailleurs. Les rideaux fermés des boutiques estivales dépriment même les gens du cru, ceux-là mêmes qui en pleine saison touristique aspiraient à ce que leurs rues et leurs églises soient tout à eux. C'est une erreur de croire que les gens qui pourraient attenter à leur vie se décident à Noël. En vérité, leurs doigts démangent de se refermer sur une grosse corde ou un tas de comprimés en février, quand les fêtes n'ont pas rempli leurs promesses, quand l'insupportable renouveau de la vie frémit au coin de la rue.

C'est un mois particulièrement mauvais pour Verity – le mois de sa naissance, le mois de la mort de son mari. Peter Lemieux, qui pilotait des Cessnas à huit places le long de ces côtes accidentées, était mort, ironie du sort, par une nuit glaciale très semblable à celle-ci, renversé sur la route. Peter s'était arrêté pour aider une femme dont le radiateur n'avait pas résisté au frimas. Un camion de déménagement l'avait fauché. Pendant des années, Verity avait été incapable de se souvenir du son de sa voix, et elle ne savait plus si l'image de Peter qu'elle gardait en mémoire était celle de leur photo de mariage ou un souvenir réel de lui. La mère de Verity, Kathleen, veuve jeune elle aussi, et déjà à cause d'un accident de la route, hoche la tête solennellement pour manifester son empathie quand Verity s'entête à refuser de sortir les rares vidéos que Peter et elle ont filmées pendant la petite enfance de leur fils Guy. Kathleen lui suggère de temps à autre de regarder les bandes avec elle, comme si on pouvait savourer une vie effacée à l'égal d'un bain exfoliant. Verity sait que, même au bout de huit ans, voir les cheveux coupés court de Peter, sa mâchoire carrée, son hâle de pilote, un Peter perpétuellement jeune, fracasserait l'équilibre qu'elle maintient en séparant soigneusement l'avant de l'après.

Mais, plus grave encore, elle sent intuitivement que ce qu'elle ne pourra pas supporter, c'est de voir l'image de Guy bébé – le seul enfant qu'elle aura jamais, probablement –, tout petit, joyeux et confiant, ses bonnes joues rondes comme des moitiés de pêche, plus larges que son front. Le toucher de velours d'une peau de bébé, Verity s'en souvient, et cela lui fait mal de penser que cette sensation, sans doute jusqu'à la fin de sa vie, elle ne pourra que l'emprunter.

Elle sait également que, si elle n'est pas vraiment une veuve joyeuse, elle ne ressemble pourtant ni à sa mère ni aux autres jeunes veuves de ce groupe de thérapie auquel elle a brièvement participé et qui prétendaient qu'elles donneraient leurs doigts, leurs membres, des mois de leur vie pour une heure de plus dans les bras de leur mari.

Elle croit aussi savoir pourquoi, mais elle garde cette pensée soigneusement rangée tout au fond d'elle, aussi muette que son voile de mariée plié dans sa commode en cèdre. Personne d'autre que Verity n'a connu le caractère difficile de Peter, le naturel avec lequel il considérait qu'il devait contrôler sa femme comme il contrôlait tout dans sa vie bien cadrée, jusqu'à la somme précise qu'il concédait à Verity pour son déjeuner, son nombrilisme absolu démenti par un instant fatal d'héroïsme. Et personne ne se rend compte qu'entre son travail et son service militaire elle et lui n'ont passé que très peu de temps ensemble, comme un vrai couple.

La plupart des gens considèrent tout simplement que Verity Dickinson est une princesse-courage, une fille qui ne recule devant rien, une solide pragmatique de Nouvelle-Angleterre qui marche d'un pas souple sur ses longues jambes et regarde le monde de ses yeux gris profonds. Et cela convenait très bien à Verity, jusque-là.

Pendant quelques années, après la mort de Peter, elle s'est complu dans une sorte de fierté, puisque les autres la percevaient comme une femme au courage et à l'optimisme sans limites, elle qui avançait, téméraire, sur le chemin mouvant de la vie, comme s'il ne décrivait pas des tournants en épingle à cheveux, comme s'il n'était pas jonché de roulements à billes. Quand son affaire a pris de l'ampleur, Verity a adopté le tailleur à jupe courte et elle est partie, en Nouvelle-Angleterre et au-delà, faire devant des...
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