Italien en tout
Un imposteur. Voilà ce qu'est devenu, à son corps défendant, le narrateur de ce roman. Oubliés le père fantasque, tendre et dépensier, la mère austère et impénétrable. Fini le couple parental dysfonctionnel, les disputes, les fins de mois difficiles, les vacances annulées. A présent c'est dans un milieu totalement différent qu'il évolue, sous une autre identité et sous la houlette du providentiel oncle Gianni, ténor du barreau, qui aimerait bien que son protégé tire une croix sur son passé et épouse complètement son mode de vie flamboyant. Et pourtant, toujours, souvenirs et fantômes du passé ressurgissent, tourmentant sa conscience, titillant son sentiment de culpabilité, l'incitant à reparcourir les étapes d'un itinéraire qui fait de lui de qu'il est...
Tout ça enrobé dans une élégance italienne, celle de traiter de choses profondes avec sourire et légèreté.
Le père et l'amer
C'est l'histoire d'une famille comme les autres, qui ne fonctionne pas bien comme souvent. Racontée à hauteur d'enfant, mais avec l'élégance sans faille d'une écriture très maîtrisée, sans superflu. Cette histoire est esquissée avec la tendresse d'Hélène qui ne comprend pas, qui voit que son père est instable, oscillant entre amour dévorant et colères sans raison. C'est une histoire donc où cette enfant vit des tempêtes et des bonheurs avec l'intensité de son âge, dans l'ombre d'un déséquilibre incessant et d'un drame que l'on pressent. Une histoire dont on se demande comment la presque jeune fille portera les traces.
Rare
Peu importe que vous aimiez le jeu d’échecs, ou que vous en ignoriez jusqu’aux règles de base. Ça ne fait rien si la guerre froide et l’ex-URSS vous indiffèrent. On se moque assez de savoir, avant de lire, qui étaient Bobby Fischer et Boris Spassky. Et franchement, si vous n’avez jamais entendu parler du match du siècle, ça n’a aucune importance. De toute façon, vous saurez tout là-dessus très bientôt et ça ne sera pas l’essentiel. La seule chose qui compte, c’est que vous serez sidéré par la folie de l’un, la classe de l’autre, par le fait que leur monde entier est inclus dans 64 cases noires et blanches. Vous serez absorbé par l’enquête d’un homme sur ce moment incroyable, en 1972, à Helsinki. Et vous serez profondément ému par l’histoire d’un fils qui veut à toute force comprendre ce qui a tant fasciné son père : la folie d’un homme, celle d’un moment, et celle du monde d’avant la chute du mur. Profondément ému par ce fils qui, bien après la disparition de son père, va rendre vivant l’échange qu’il n’a pas pu avoir avec lui.
C’est l’histoire la plus incroyable du monde échiquéen, et celle, éternelle, des pères et des fils.
Et l’auteur a l’élégance de savoir que les choses les plus sérieuses ne peuvent se dire qu’avec humour. D'ailleurs, Alessandro Barbaglia n’est pas quelqu’un de trop sérieux : il écrit, mais il est aussi libraire.
Les doutes de Jésus
Jésus n'était pas nécessairement sûr de lui, au début. Peut-être se sentait-il abandonné. Talentueux, il n'a pas forcément utilisé ses qualités à bon escient tout de suite. Si ça se trouve, il a erré, a cherché un père incertain, s'est cherché lui-même, avant.
Peut-être Jésus était-il égaré dans cette vie ; on peut même penser que pendant toutes ces années dont on n'a pas de trace, il s'est morfondu d'échecs en trahisons.
On peut aller jusqu'à croire que c'est pour ça qu'il est devenu le Christ. C'est la supposition de ce roman de la construction d'un homme qui devint qui l'on sait.
Le silence est de diamant
Galerie de portraits qui dressent les contours d'une époque, celle d'avant que la communication tienne lieu de politique, mais déjà un moment où faire de la politique ne suffisait plus à imposer le respect.
Ainsi, quand il faut parler, "le Président se tait", et laisse toute la place aux spéculations les plus hardies, aux fantasmes. Il y a de quoi puisqu'autour du Président de la République, il y a des diamants, un dictateur, une crise pétrolière... Certains (é)lecteurs, (é)lectrices s'en souviendront !