Yves Ravey a le talent narratif d'aborder le presque rien, d'ausculter la banalité, d'inventer des personnages apparemment sans envergure toujours un peu menteurs, un peu escrocs mais assez gentils en surface, un peu superficiels, pas forcément capables du pire mais intéressés par le gain, l'argent et la roublardise avec une naïveté et une autosatisfaction confondantes. "Que du vent" n'échappe pas à cette règle, en bon roman noir mêlant loufoquerie et tragédie, utilisant les codes narratifs inhérents au genre pour mieux construire puis déconstruire les personnages et se moquer d'une société et d'un mode de vie figés par les préjugés et les stéréotypes et surtout par l'argent et la cupidité, voire la stupidité. Barnett pourrait être le héros typique d'un feuilleton télévisé américain, à peine vieilli, celui aussi du roman-feuilleton un peu sentimental, sans grande intensité qui retient néanmoins le lecteur avide de rebondissements. Barnett se perçoit en fin observateur du monde, de son entourage familial et de son voisinage immédiat. Homme de la situation, il est animé de projets multiples, mais bancals, aussi désastreux et minables les uns que les autres. Il a la ferveur de sa naïveté, de la crédulité qu'il déploie avec acharnement. Mensonge ou vérité ? Il ne résiste guère aux regards et aux invitations appuyés de sa voisine, Sally, prétendument délaissée par son époux et arborant ostensiblement son ennui au bord de la piscine. Le cadre est posé, à la fois géographique et social, l'hameçon tendu, un pactole supposé conséquent, niché au creux d'un coffre fort dont la combinaison est déjà connue...
Yves Ravey s'amuse, temporise, ironise. Tous les ingrédients sont ici réunis dans une vraie fausse intrigue laissant une petite musique littéraire parfaitement rythmée. C'est exquis.

Roman habile et surprenant pour évoquer les équilibres fragiles du monde comme sait si bien le faire Erri De Luca. L'horloger passager éphémère de la vie se met régulièrement à l'abri du monde et du chaos, loin du regard des hommes, en sage contemplatif et vieillissant. Il semble maîtriser parfaitement les règles du Mikado jusqu'au jour où ses doigts tremblent et le laissent apparemment déconcerté et sensiblement désemparé. A-t-il rompu l'ordonnance du monde environnant? L'arrivée inopinée d'une jeune tsigane ne semble pas contrarier sa solitude. Une amitié naissante s'établit, riche de dialogues et d'entente. Mais qui sont-ils réellement? Est-il possible de tricher au Mikado?

Cormac McCarthy et Manu Larcenet réunis, c'est l'évidence même. On pouvait rêver, imaginer une telle association et elle est là, devant nos yeux, sublime de profondeur, de silences, d'éloquence visuelle. C'était presque inespéré et c'est advenu. Les deux œuvres de ces deux immenses auteurs et artistes vous sont offertes dans un même volume, qu'attendez-vous pour vous en emparer? Une fin du monde programmée?

Aussi drôle qu' épouvantable et aussi épouvantable que drôle! Ce roman vous fait tout stopper. Katie Slape et Philomela Drax deviennent votre priorité et les rues de New York en cette fin de dix-neuvième siècle n'auront plus de secrets pour vous. C'est un véritable bonbon littéraire qui dure longtemps, longtemps. Il ne fond pas; il vous habite.

Coup de foudre incontestable pour ce manga aux traits délicats et détaillés inaugurant la toute nouvelle collection Le Renard Doré des éditions Rue de Sèvres. Ambiance magique et envoûtante, parfois déconcertante laissant la part belle à l'imaginaire, aux rêves de l'enfance, aux souhaits inexprimés. A partir de 9 ans sans aucune modération et bien au -delà. C'est beau, c'est magique et philosophique.