EAN13
9782960155945
ISBN
978-2-9601559-4-5
Éditeur
Vies parallèles
Date de publication
Nombre de pages
246
Dimensions
20 x 13,5 x 1,5 cm
Poids
320 g
Langue
français
Fiches UNIMARC
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Renaissance noire

Le bréviaire de Saint-Orphée - 2

Vies parallèles

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De quoi sommes nous fait?  Assurément de ce qui nous précède. Mais s’il nous parait évident d’appliquer cette logique à nous-mêmes, le passé nous semble composé d’éléments clos sur eux-mêmes.  Nous saisissons l’histoire par blocs. La Renaissance est humaniste et pas autre chose. Le baroque est extravagant et n’est que cela. On découpe le réel en tranches. On le débite pour mieux le circonscrire.  Mais on en oublie vite qu’il n’est pas cela. Que le mode opératoire de connaissance d’une chose n’est pas la chose. Pour retrouver vraiment l’homme, il convient d’aller par-delà le morcellement qu’a opéré sur lui l’histoire. Renaissance noire, deuxième tome du chef d’œuvre de Miklos Szentkuthy, Le Bréviaire de Saint-Orphée, est centré sur la personnalité de Monteverdi. Mais le centre chez Szentkuthy est très large ou comme percé de traverses. Et approcher Monteverdi se fait chez lui avec Saint-Dunstan, Brunelleschi ou Roger Ascham. Soit un Evêque mort en 988, l’inventeur de la perspective au 15ème siècle ou le précepteur de Elisabeth Tudor, mort en 1568, soit un an avant la naissance du génial créateur de l’Orfeo. C’est bien la première chose qui frappe à la lecture de Renaissance noire : l’anachronisme. Non pas l’anachronisme vécu comme erreur, ni forçage, mais comme procédé. Par lequel se construit la possibilité de recomposer une histoire qui ne soit plus une succession d’instant mais un flux. Un flux dont émerge l’idée d’un homme qui ne peut accéder vraiment à l’existence qu’hors de soi. Et dans ce flux qu’est l’histoire, si elle est vécue comme telle, se donnent à contempler des « périodes », des « tendances » qui ne sont plus cloisonnées mais issues, aussi, de leurs contraires. Disparait peu à peu le mirage d’une histoire progressive, logique, sagement « rangée », derrière la réalité d’un maelström. Du sein duquel douter d’un dieu peut être signe d’affectueux respect et la prière d’odieux blasphème. D’où l’harmonie d’une orbe peut surgir d’autre part que d’un esprit éthéré – chaque orbe jaillit des mains d’une fille de joie. La Renaissance de Miklos Szentkuthy est noire car reconnaissant provenir de son inverse, l’enchâsser dans une filiation sagement et strictement hellène la dépareillant de ce qui la constitue vraiment. Du même ne sourd que le même. En enrichissant l’exégèse renaissante d’un opus puisant à grands renforts dans ce qui lui parait extérieur, l’Ogre de Budapest nous rappelle que c’est la puissance de l’attrait troublé de répulsion pour l’autre qui fonde tout changement marquant. Et cet autre, n’est ce pas aussi la prose elle-même de Miklos Szentkuthy! En ciselant le langage, l’enrichissant d’une érudition sans borne, en définissant avec la plus grande précision l’imprécision des choses, il poursuit ainsi son objectif superbement démesuré, et inéluctablement voué à l’échec, d’épuiser le réel.
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