Les âmes errantes

Cecile Pin

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  • Conseillé par (Libraire)
    20 juillet 2023

    Les fantômes de l'exil

    Quitter son village, son pays, une partie de sa famille. C'est le sort de millions de personnes à travers le monde. Par bateau, à pieds, en train, leur destin, unique, semble pourtant se répéter à l'infini. Pourtant, derrière les chiffres, il y a des noms, des êtres humains, des histoires. Cécile Pin nous raconte l'une d'elle.

    Celle d'Anh, de ses frères et des fantômes de sa famille qu'ils ont emportés avec eux en quittant le Vietnam dans les années 70. Les troupes américaines ont quitté le pays, mais l'horizon semble sombre et les espoirs d'une vie meilleur minces. Un oncle est parti aux États-Unis, il s'en est bien sorti, dit-on. Le père décide alors de quitter le village pour le rejoindre. Anh partira devant avec ses deux jeunes frères, une étape dans un camp de migrants où le reste de la famille devrait les rejoindre. Mais lorsqu'Anh est appelée pour reconnaître les corps, elle comprend.

    Elle comprend qu'elle est désormais seule avec ses frères, qu'elle en est responsable, qu'elle devra tout faire pour qu'ils s'en sortent. La rancœur contre cet oncle qui a précipité la disparition de ses proches, la pousse à choisir l'Angleterre plutôt que les États-Unis pour point de chute. Un pays peu accueillant, ce sont les années Thatcher et ces immigrés sont vu d'un mauvais œil. Pourtant, Anh ne lâchera rien, fera tout ce qui est possible pour offrir à ses frères une éducation, une place dans ce nouveau pays, un toit, à manger.

    Le destin d'Anh est à la fois terrible et admirable. On lit ce destin tragique, on vit avec ce trio d'orphelins, on tremble de froid avec eux, on partage leurs doutes, leurs peines mais aussi les moments plus lumineux d'entraide. Et pourtant, on ne peut s'empêcher de penser à tous ceux qui ont connu le chemin de l'exil. Ceux qui ont trouvé un nouveau foyer et ceux qui ne sont jamais arrivés. Un roman bouleversant, pétri d'humanité, qui ouvre le regard et rappelle, puisqu'il le faut encore, que les exilés le sont par nécessité et non par choix.

    (Page, Rentrée Littéraire 2023)
    Aurélie